De la fève à la tablette, le chocolat révèle une infinité d’arômes, de textures et d’émotions.
À Lyon, Olivier Mauchamp, fondateur de La Manufacture du Chocolat, fait partie de ces rares artisans qui torréfient eux-mêmes leurs fèves, pour en extraire la quintessence. Dans cet entretien, il raconte la genèse de son aventure, son rapport à la matière et sa vision d’un chocolat éthique, sincère et profondément humain.

Diggers est née en 2018, d’abord sous la forme d’un bar à chocolat. L’idée : faire découvrir le cacao autrement, à travers des boissons et pâtisseries artisanales, et révéler la richesse aromatique de chaque origine.
Le succès a été immédiat, mais une question s’est vite imposée : pourquoi acheter le chocolat d’autres artisans alors que je pourrais créer le mien ?
La période du Covid, avec la fermeture du bar, m’a offert le temps d’explorer cette idée. Après de nombreux essais, La Manufacture du Chocolat est officiellement née en 2021, ouvrant un nouveau chapitre : celui du bean-to-bar, de la fève à la tablette.

Mon premier contact avec le cacao remonte à un voyage en République dominicaine, à la rencontre des producteurs et des plantations de cacaoyers. J’y ai découvert la culture du cacao dans toute sa richesse : les arbres en pleine floraison, les cabosses colorées fraîchement récoltées et le savoir-faire passionné des planteurs.
Voir de mes propres yeux tout le travail, la patience et la précision nécessaires pour produire un cacao de qualité a profondément changé ma perception de ce produit. C’est à ce moment-là que j’ai compris que le cacao n’était pas seulement un ingrédient, mais le fruit d’un terroir, d’une histoire et d’un engagement humain.
Cette expérience a marqué le point de départ de ma passion pour le cacao et l’envie, plus tard, de lui donner vie à travers La Manufacture du Chocolat.
Mon ambition première, c’était de fabriquer mon propre chocolat
Mon ambition première, c’était de fabriquer mon propre chocolat, pour pouvoir le servir dans mon bar à chocolat. Je voulais que chaque boisson, chaque pâtisserie soit préparée avec notre propre matière, issue de notre propre savoir-faire.
Mais très vite, j’ai aussi eu envie d’aller plus loin : développer une véritable manufacture, capable de proposer une gamme complète de tablettes, confiseries et créations chocolatées artisanales.
L’idée, c’était de réunir dans un même lieu la dégustation, la fabrication et la découverte du chocolat.
Le principal défi, c’était de tout mener de front : faire vivre le bar à chocolat, qui rencontrait un vrai succès, tout en lançant et en développant la manufacture.
Le bar attirait énormément de monde, et il me demandait beaucoup de temps et d’énergie au quotidien. En parallèle, la manufacture prenait de l’ampleur et nécessitait une implication totale.
À un moment, j’ai compris qu’il fallait choisir pour avancer. J’ai donc pris la décision, en juillet 2023, de fermer le bar à chocolat afin de me consacrer pleinement à la fabrication et au développement de la Manufacture du Chocolat.
C’était un choix difficile mais évident : celui de la passion, du sens et de la continuité du savoir-faire.
Ce qui me différencie, c’est que je fabrique mon chocolat à partir des fèves de cacao elles-mêmes. Ce travail “bean-to-bar” permet de maîtriser chaque étape — de la sélection des origines à la torréfaction — et d’exprimer pleinement la personnalité de chaque terroir.
Chaque chocolatier torréfacteur développe ainsi sa propre signature aromatique, façonnée par ses choix, ses goûts et sa sensibilité.
Pour moi, c’est cette liberté de création et cette quête d’équilibre entre intensité, finesse et émotion qui rendent chaque chocolat unique.

Le métier de chocolatier torréfacteur bean-to-bar, c’est avant tout celui de la maîtrise de tout le processus de fabrication, depuis la fève jusqu’à la tablette.
Tout commence par le sourcing : je sélectionne mes fèves dans des plantations en agroforesterie, où les planteurs prennent soin de la terre, des arbres et du cacao. La qualité d’un chocolat dépend énormément du travail réalisé à l’origine — tant sur les pratiques agricoles que sur les méthodes post récole : fermentation, séchage, stockage.
Une fois cette base exceptionnelle assurée, vient la partie transformation : torréfier, broyer, concher, tempérer… chaque étape est l’occasion d’exprimer ma personnalité et ma sensibilité à travers le goût.
Mon objectif est de sortir des standards industriels pour proposer des profils aromatiques uniques, fidèles au terroir de chaque origine.
Je tiens aussi à produire un chocolat éthique et pur, sans ingrédient superflu. Tous mes chocolats ne contiennent que deux ingrédients : des fèves de cacao de spécia lité et un sucre de betterave bio non raffiné.
C’est une approche artisanale exigeante, à contre-courant des chocolats industriels souvent enrichis en graisses ajoutées, émulsifiants ou arômes. Ici, on revient à l’essentiel du goût.
Travailler la fève, c’est avant tout une question de maîtrise et de sincérité.
En partant de la matière brute, je peux sélectionner précisément les cacaos, connaître leur origine, leur mode de culture et les conditions dans lesquelles ils ont été fermentés et séchés.
Cela me permet d’être totalement transparent sur ce que je propose, mais aussi d’avoir la main sur le goût final.
Chaque étape, de la torréfaction à l’affinage, devient un choix artisanal qui influence l’arôme, la texture et la personnalité du chocolat.
C’est ce niveau de maîtrise qui, pour moi, fait toute la différence entre transformer un chocolat existant et créer son propre chocolat.
la main de l’artisan fait toute la différence
Par erreur, j’ai reçu une palette de sacs de cacao destinée à un autre chocolatier. En découvrant les sacs, j’ai réalisé qu’il travaillait exactement les mêmes fèves que moi : même origine, même plantation, même récolte.
Curieux, j’ai acheté une de ses tablettes pour comparer nos chocolats. Et là, ce fut une révélation : malgré la même matière première, nos créations étaient radicalement différentes. Les arômes, les équilibres, les textures… tout variait selon la torréfaction et les choix de transformation.
Cette expérience m’a rappelé que, dans ce métier, la main de l’artisan fait toute la différence. Le chocolat est une véritable écriture personnelle : une fève peut s’interpréter de mille façons.
Avant tout, ma passion.
Beaucoup de gens dégustent une tablette de chocolat sans imaginer tout le travail qu’elle représente : de la récolte de la cabosse de cacao jusqu’à la tablette de chocolat, il se passe des mois voire des années
À travers les ateliers que j’organise chaque samedi matin, j’ai envie d’offrir une immersion complète dans cet univers.
Que ce soit lors des ateliers de fabrication ou des ateliers de dégustation, mon objectif est de faire découvrir les coulisses du chocolat, d’éveiller la curiosité, et surtout de partager le plaisir du goût et de la création.
Ce sont toujours de beaux moments d’échange, où chacun repart avec une autre vision du chocolat : plus consciente, plus respectueuse, plus passionnée.
un bon chocolat commence par une fève bien cultivée et un producteur justement rémunéré
Le choix des fèves est une étape essentielle.
Je sélectionne mes cacaos selon leurs caractéristiques botaniques et leurs qualités organoleptiques. Chaque terroir raconte une histoire : le sol, le climat et les pratiques agricoles influencent profondément le goût final du chocolat.
Je travaille uniquement avec des plantations en agroforesterie, où les producteurs respectent la biodiversité et bénéficient de conditions de travail équitables.
Pour moi, un bon chocolat commence par une fève bien cultivée et un producteur justement rémunéré. C’est une relation fondée sur la confiance et le respect mutuel.
Pour moi, cette relation est centrale. Quand un chocolatier reçoit ses sacs de fèves dans son atelier, la moitié du travail est déjà faite.
Les fèves ont été récoltées, fermentées et séchées sur place, souvent dans des conditions exigeantes. Comprendre ce qui se passe avant qu’elles n’arrivent ici, c’est comprendre l’âme du produit.
C’est pourquoi il me paraît essentiel de partir à la rencontre des producteurs, de voir comment ils cultivent, récoltent et transforment le cacao.
J’ai eu la chance de le faire en République Dominicaine, en visitant plusieurs plantations. J’y ai découvert des hommes et des femmes passionnés, profondément engagés dans leur travail.
Voir leurs gestes, comprendre leurs contraintes, observer les centres post-récolte où les fèves sont fermentées et séchées… tout cela permet de boucler la boucle et de donner encore plus de sens à ce que je fais ici, à la Manufacture.
Le cacao est avant tout une matière première agricole, soumise aux aléas du climat et aux fluctuations des marchés. Ces facteurs influencent naturellement le prix du chocolat et transforment la manière dont nous sourçons et valorisons les fèves.
Pour autant, je reste optimiste. Le métier de chocolatier bean-to-bar a un avenir prometteur : il incarne un retour au sens, à la transparence, et à la connexion entre l’artisan, la terre et le goût.

Ce qui m’émerveille toujours, c’est la découverte.
À chaque nouvelle origine de fève, je découvre des saveurs que je n’avais jamais goûtées, des notes aromatiques inattendues. C’est un peu comme ouvrir une fenêtre sur un paysage sensoriel différent à chaque fois.
J’aime aussi expérimenter, tester des recettes originales et des associations surprenantes.
J’ai, par exemple, travaillé un chocolat au houblon, un autre à l’anis, en jouant sur des techniques de macération du cacao. Chaque essai m’apprend quelque chose de nouveau sur cette matière fascinante.
Ce qui me passionne, c’est que le chocolat est vivant : il réagit, évolue, demande de la précision et de l’attention.







🎉 Fermeture annuelle – Réouverture le 27 août 🎉
La Manufacture du Chocolat fait une petite pause estivale ☀️
Les commandes restent ouvertes pendant notre fermeture, mais elles seront expédiées à partir du 27 août.
Merci pour votre patience et votre confiance.
Bel été à vous ! 🍫🌿